I. Les 4 types de Biocarburants
Le monde des biocarburants se décompose en 4 grandes familles : l’HVB (Huile Végétale Brute), le biodiesel (EMHV), le bioéthanol (ETBE), et le biométhanol. HVB et biodiesel sont utilisés dans les moteurs diesel, et bioéthanol et biométhanol sont utilisés dans les moteurs essence. Ces 4 carburants verts permettent des réductions des émissions de GES et aussi de NOx.
- L’HVB est produit à partir de colza ou de tournesol. On extrait l’huile de la graine par pression à froid, ce qui permet d’extraire environ 85% de l’huile contenue dans la graine, avec éventuellement un procédé d’extraction chimique pour extraire jusqu’à 99% de l’huile. L’huile est ensuite purifiée, puis directement utilisée dans un moteur diesel qui doit subir quelques modifications. Le procédé co-produit des tourteaux, qui peut être vendu comme aliment pour le bétail. Le tourteau est de meilleure qualité si il reste une petite quantité d’huile à l’intérieur, c’est à dire si on n’utilise que la pression à froid comme procédé d’extraction. Par contre, au delà d’un certain niveau de production d’HVB, le marché des tourteaux devait rapidement être saturé, et donc l’écoulement de ce sous-produit deviendrait un problème. On produit environ 1,5 t de tourteau pour 1 tep d’HVB. Les moteurs, pour accepter les HVB, doivent être modifiés ; en effet, les HVB ont une viscosité variant en fonction de la température, et figent par grand froid ; d’autre part, la combustion est plus chaude et l’indice de cétane est plus faible que pour le gazole. Conçus spécifiquement ou adaptés, les MCI utilisant de l’HVB doivent permettre un contrôle de la viscosité de l’huile en fonction de la température. Classiquement, on a des systèmes de préchauffage de l’huile afin de garantir une viscosité suffisamment faible ; on peut se servir du circuit d’eau de refroidissement pour préchauffer l’huile, dans ce cas on installe un système de bicarburation permettant de démarrer au gazole et ensuite de switcher sur l’HVB. Dans ce cas, on peut rouler jusqu’à 100% HVB. Sans ces modifications, on peut, sur un moteur ancien, utiliser jusqu’à 30 % d’HVB, mais en aucun cas sur un moteur récent type HDI. Les HVB ont pour avantages : une production sans transformation chimique, un bon rendement énergétique global, un pouvoir lubrifiant dans le moteur. Ils ont pour inconvénients : un faible indice de Cétane, une odeur de friture lors du fonctionnement, un rendement par hectare réduit.
- Le Biodiesel (EMHV) provient, comme les HVB, du tournesol ou du colza. Après pressage, on récupère et on filtre l’huile, puis on opère une réaction d’estérification, avec un léger apport de soude et de méthanol (ou d’éthanol). La réaction peut se faire sans soude, mais elle est alors beaucoup plus lente. Le biodiesel peut être consommé dans n’importe quel moteur diesel, sans modification majeure, même dans les diesel de nouvelle génération. Par contre, on l’utilise rarement à 100%, bien que ce soit possible. Classiquement, on a un mélange 50-50 avec du gazole dans les flottes captives. Le bilan énergétique est un peu moins bon que pour l’HVB, car la réaction d’estérification nécessite de l’énergie. Le Biodiesel a pour avantages : une absence d’odeurs, une utilisation possible sans modification sur les moteurs, un rendement énergétique correct, un pouvoir lubrifiant. Il a pour inconvénients : un rendement par hectare réduit. Le Biodiesel peut également être produit à partir de gaz de synthèse, lui même obtenu par gazéification de biomasse (procédé BTL). Le rendement surfacique est alors bien meilleur, car on utilise la totalité de la plante et non pas la graine uniquement. L’EMHV peut enfin être produit à partir d’algues, composées à 50% en masse d’huile, le rendement surfacique est alors jusqu’à 20 fois supérieur à celui obtenu avec du colza.
- L’éthanol est utilisé dans les moteurs essence, à hauteur de 15% dans un moteur non modifié et jusqu’à 85% dans un moteur adapté (flex-fuel au Brésil). Il peut être produit à partir du blé, de la canne à sucre, ou de la betterave. Sous nos latitudes, la production à partir de canne à sucre n’est pas envisageable, mais c’est elle qui est utilisée avec grand succès au Brésil. L’éthanol possède un fort indice d’octane, mais une faible capacité énergétique : les 2/3 de celui de l’essence. Il possède un effet nettoyant sur le moteur. Pour l’utiliser à plus de 15% dans un moteur, il faut modifier les réglages (injection, avance à l’allumage, …) et mettre des durites résistant à l’attaque de l’alcool. Utilisé tel quel, l’éthanol pose un problème du fait de sa forte volatilité, qui entraîne l’émission de polluants avant même la combustion. Pour remédier à ce problème, l’ETBE à été développé. Mais sa production nécessite de l’énergie, ainsi l’efficacité énergétique final est elle plus faible. L’efficacité énergétique est acceptable lorsqu’on valorise le reste de la plante (la partie qui ne produit pas d’alcool), par exemple en s’en servant pour alimenter en chaleur le procédé de distillation. L’éthanol est produit par fermentation aérobie et distillation, mais une autre méthode est à l’étude : l’hydrolyse enzymatique ; ce procédé permettrait de produire de l’éthanol à partir de taillis à croissance rapide. Les rendements pourraient être améliorés de façon significative avec ce procédé. L’éthanol a pour avantages : un rendement à l’hectare élevé, un fort indice d’octane. Il a pour inconvénients : un faible rendement énergétique, une modification des moteurs nécessaire pour rouler à 100%.
- Le biométhanol n’est pas encore produit à grande échelle. Il est issu de la filière BTL. Après gazéification de la biomasse, est obtenu par synthèse du gaz obtenu. Doté d’une combustion très propre, il pourrait être produit avec des rendements élevés, étant issu de l’efficace filière BTL.
II. Un mot sur le BTL
Le BTL (Biomass To Liquid) consiste à gazéifier par chauffage, de la biomasse (bois, feuilles, tiges, colza, …). De multiples variétés de plantes peuvent être utilisées. On obtient du gaz de synthèse (CO + H2), qui est ensuite transformé en méthanol. A partir du méthanol, on peut obtenir du gasoil de grande qualité, extrêmement propre et performant. Le principal avantage du BTL est de valoriser la totalité de la plante en biocarburant, et non pas uniquement les graines par exemple. On obtient ainsi des rendements à l’hectare élevés, de l’ordre de 5 fois supérieurs à la filière classique. Pour apporter la chaleur nécessaire à la gazéification, on brûle une partie de la biomasse, classiquement, ou bien, selon un nouveau procédé à l’étude, on utilise des arcs électriques. Ce dernier procédé permet de transformer la totalité de la biomasse en biocarburant ; par contre, elle impose l’utilisation d’énergie électrique.
III. Un mot sur les algues
Il existe des algues capables de produire de l’huile une fois pressées, et donc du biodiesel, comme on le ferais avec du tournesol ou du colza. La différence, c’est que l’huile compose 50% de la masse de ces algues, alors que le colza n’est composé que d’environ 15% d’huile. De plus, alors qu’une seule récolte par an n’est possible pour les plantes habituelles, ont peut récolter les algues plusieurs fois par semaine, en raison de leur croissance très rapide. Ces algues monocellulaires sont bien adaptées à la culture dans des réacteurs automatisés, qui ont l’apparence de panneaux solaires verts à structure tubulaire. Ces organismes absorbent une grande quantité de CO2 ; leur production est maximale lorsqu’on leur injecte une grande quantité de CO2, et lorsqu’ils bénéficient d’un fort rayonnement solaire. Ces algues sont même capables de se nourrir et ainsi de valoriser certains déchets. Il est possible de coupler une unité de production de biocarburant à partir d’algues à une industrie émettrice de CO2, une centrale électrique au charbon par exemple. Dans ce cas, les algues absorbent le CO2 produit par la centrale, et purifient ainsi les gaz rejetés.
Cela revient à avoir un carburant totalement propre, sans émissions de CO2, car le CO2 rejeté par le moteur lors de la combustion du biocarburant est celui qui a été absorbé par les algues dans les rejets de la centrale. On estime qu’une superficie de 200 000 ha placées dans le désert produiraient 28 milliards de litres de biocarburant chaque année, soit la totalité de la consommation des Etats-Unis ! Le rendement à l’hectare est de l’ordre de 90 fois celui du colza, et 25 fois celui de la Betterave !